Les noms révolutionnaires des communes

Publication du jeudi 17 décembre 2020

 

 

   Au moment de la Révolution, et plus particulièrement en 1793, les changements de noms de commune (appelés également « débaptisations ») sont une pratique courante. Cela s’explique par la volonté de faire table rase du passé, d’escamoter toute évocation du christianisme, de la féodalité et de l’Ancien Régime.


     Dans un souci de clarification administrative, un décret de la Convention nationale en date du 16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II) annonce que toute commune ayant changé de nom « depuis l’époque de 1789 » doit « faire passer au comité de division la nouvelle dénomination ».

 


 

    En 1790, l’administration du territoire français connaît une véritable refonte : la disparition des anciennes provinces et la naissance des communes, qui accompagne celle des départements.

    Cette carte du département de la Sarthe, datant de 1790, a été rehaussée à l’aquarelle pour en faire ressortir les reliefs. L’orthographe du nom de certaines communes a évolué : « Ecomoy », « PontValain », « Ruaudain » ou bien encore « Gueceslard ». Rappelons que Sarthe s’écrit souvent à l’époque (et ce jusqu’au premier tiers du XIXe siècle) sans « h ».

   Au moment de la création des départements, les communes n’ont pas encore pris leur nom révolutionnaire. Cette pratique se développe sous le régime autoritaire de la Terreur, entre 1793 et 1794. Le comité de division qui régit et ratifie les « débaptisations » souhaite des noms « courts et sonores », « des noms historiques, même ceux de quelques grands hommes qui ont été proclamés par le peuple et par la nation entière ». Une liste de 183 termes pouvant être accolés à un nom local ou régional est établie. Parmi ces mots figurent le mot « ciel », « montagne » ou « Égalité ».

   Au final, ces initiatives de « débaptisations » se révèlent des échecs. Ces changements de noms, si nombreux soient-ils (estimés à 1200 en France), sont temporaires et entraînent des confusions. Les nouveaux noms sont vite abandonnés au profit des anciens, bien plus solidement ancrés dans l’esprit des habitants.

 


 

     Le comité de Salut Public (organe mis en place par la Convention le 6 avril 1793) écrit à l’agent national du district de Saint-Calais, représentant du gouvernement en charge du maintien de l’ordre et de l’application des lois : « Plusieurs communes ont changé de noms, et ne rappelant point les anciens dans leurs correspondances, il n’est pas possible de connaître les lieux d’où partent, et où doivent être adressées les lettres et paquets. Le Comité te recommande de prévenir, dans le plus bref délai, les Municipalités de ton arrondissement, qui sont dans ce cas, d’ajouter leurs anciens noms lorsqu’elles écrivent, afin d’éviter les entraves et les retards qui ont lieu jusqu’à présent. Salut et fraternité ».

   Parmi les 28 communes sarthoises qui changent de nom de manière provisoire, sous la Révolution, peuvent être citées Auvers-le-Hamon (Auvers-l’Union), Saint-Calais (Calais-sur-Anille) ou bien Saint-Mars-la-Brière (Brière-l’Égalité). Quant à Château-du-Loir, la commune connaît trois dénominations : Mont-du-Loir, Mont-sur-Loir et Vau-du-Loir.

 


 

    Voici une correspondance adressée par Pelard, agent national du district de Sillé-la Montagne, qui n’est autre que le nom révolutionnaire de Sillé-le-Guillaume. Elle a été baptisée ainsi en raison de ses reliefs. L’en-tête du courrier porte la devise suivante « Liberté, Égalité, ou la Mort ».

    La toponymie du territoire est largement bouleversée sous la Révolution : lorsque les départements sont nés en 1790, ces derniers ont été nommés d’après des éléments naturels (rivières ou montagnes notamment). Le souvenir des anciennes provinces est ainsi chassé des mémoires.

 


Partager sur